(extrait de mon livre)
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Les lièvres, les écureuils, les araignées, les papillons de nuit, les renards, les hiboux ainsi que toutes les autres créatures de la campagne, s'étaient réunis en demi-cercle autour du camphrier. Les noiraudes grimpaient en file indienne le long de l'arbre gigantesque illuminé par le clair de lune. Tous attendaient le miaulement du lointain que le vent viendrait rapporter. La nuit tant redoutée était arrivée. Déjà, les pleurs des lièvres s'élevèrent parmi la masse, à cela s'ajoutèrent celles des grenouilles et des crapauds. Le tout composait une cacophonie des plus étranges.
- Allons, allons ! Cessez vos lamentations, s'exclama un renard. Nous devons leur réserver un départ chaleureux, dans le rire et la... joie.
La voix du renard ne fut pas convaincante. Lui-même tentait de contenir sa tristesse et il fit un gros effort pour ne pas la laisser transparaître.
- Il arrive, il arrive ! s'écria soudain un papillon nocturne dont les ailes battaient de manière irrégulière tout en traçant un cercle dans le vide.
Les gémissements s'estompèrent, tous se tinrent en alerte, immobiles et silencieux comme si le sablier du temps ne s'écoulait plus. Le vent se souleva brusquement à l'Ouest, les feuilles frémirent, les brindilles voltigèrent, les branches oscillèrent sur son passage.
Maaaaouuu !!
Le miaulement rauque du chat-bus leur parvint enfin, la troupe suivit du regard les deux halos de lumière jaunâtre qui zigzaguaient au sommet de l'étendue des arbres.
Maaaouuuu !!
Le chat-bus bondit avec agilité, il survola la rizière par ce saut unique et il atterrit en deux temps trois mouvements près de la troupe amassée. Ce fut si rapide que celle-ci n'avait pas sourcillé et certains scrutaient toujours la cime des arbres alignés. Au bout de quelques secondes, le sablier reprit son égrenage. Les animaux s'approchèrent du chat-bus aux grands yeux malicieux et aux babines en croissant de lune. Des lampions de souris éclairaient l'avant et l'arrière du félin automobile.
Le renard s'était avancé jusqu'à la première fenêtre à gauche du bus poilu, le coeur lourd mais la mine solennelle.
*Boiiinng*
La fenêtre s'étira avec la sonorité du diapason, une énorme créature grise et enveloppée se dressa devant l'ouverture qui se formait. Elle arborait un sourire identique à celui du chat-bus, l'insouciance au coin des lèvres. La fenêtre ployait sous sa masse quand elle descendit à terre: le grand Totoro était de retour de son expédition du soir. La dernière avant le grand départ. Il était suivi par une créature bleue plus petite, le "Totoro moyen", et d'une encore plus minuscule, le " petit Totoro".
(à suivre...)
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